Le royaume
Julien Colonna, France, 2024o
Corsica, 1995. It’s Lesia’s first summer as a teenager. One day a man bursts into her life and takes her to an isolated villa where she finds her father, in hiding, surrounded by his clan. An underworld war erupts. The noose is tightening around them. Death strikes. Forced to go on the run, father and daughter will learn to face and understand one another.
Dans la foulée de Thierry de Peretti (Une vie violente), premier cinéaste corse à avoir vraiment fait entendre la voix de cette île rattachée à la France depuis 1768, d'autres jeunes auteurs locaux se lancent. Repéré par le festival de Cannes, Julien Colonna est de ceux-là avec Le royaume. On y suit, durant l'été 1995, une adolescente orpheline de mère, qui vit auprès de sa tante dans un village. Lesia vient de se trouver un petit ami quand son père la fait venir pour passer quelques jours avec lui. Or, ce Pierre-Paul est un chef de clan mafieux recherché, avec des accointances politiques. Et s'il n'aspire qu'à passer un peu de temps avec sa fille, il se trouve pris dans un engrenage qui l'oblige à riposter et à se déplacer encore et toujours. L'originalité consiste à présenter tout ceci du point de vue de Lesia, qui commence à comprendre. Ici, presque toute la violence se déroule hors champ, sans explications précises. Une tentative d'appeler son ami met le clan en danger, la mort frappe toujours plus près, et pour finir, il ne restera plus que le père et la fille, planqués dans un camping au milieu des touristes. Une belle idée, qui fait se côtoyer ces deux mondes qui s'ignorent tandis que Pierre-Paul raconte enfin à Lesia toute une existence placée sous le signe du sang versé. Renforcé par le choix d'interprètes amateurs, le réalisme de ce Royaume a particulièrement plu à la critique anglo-saxonne, qui y a trouvé des échos de la saga du Parrain. Mais si Colonna n'est pas encore Coppola, on apprécie justement cette approche «en douceur» de la face cachée de la Corse, avec une absence de clichés due à son fort ancrage local.
Norbert Creutz